Et nos besoins « Bordel», qui s’en préoccupe?

Tous les êtres humains ont des besoins mais tous les êtres humains n’arrivent pas à les combler de façon égale, voire peu ou pas du tout. Cela suscite beaucoup de colère chez les personnes assistées sociales, les travailleuses et travailleurs au salaire minimum, les personnes âgées, les étudiantes et les étudiants, les personnes sans chèque, etc. Mais le gouvernement, les riches et la majorité de la population ne s’en préoccupent pas. Les derniers par indifférence ou ignorance, les autres par cupidité et la recherche du profit à tout prix. La pauvreté est une nécessité pour le système capitalisme. Si cette colère explosait, le monde changerait!

 

La pauvreté

Les personnes à l’aide sociale sont pauvres, même très pauvres. Pourtant, le gouvernement assure qu’il comble les besoins essentiels des personnes assistées sociales. Il affirme que la prestation de base couvre les besoins suivants : alimentation, logement, entretien ménager, soins personnels, communications, habillement, ameublement, transport, loisirs. Mais, le gouverneMENT, MENT! Il est impossible, avec des prestations si dérisoires (insignifiantes) de couvrir tous ses besoins. Une fois le loyer payé, il ne reste que des miettes pour se nourrir et payer ses autres besoins. Comment combler ses besoins essentiels avec un chèque de 726 $ par mois, pour un adulte « considéré apte au travail » (janvier 2022) ?

Le gouvernement n’est pas gêné de dire que la prestation couvre les besoins de base puisqu’il entretient un flou sur les montants d’aide sociale accordant aux uns un minimum et aux autres le minimum du minimum. Il entretient aussi un flou sur l’aptitude au travail en reconnaissant une majorité de personnes comme aptes au travail alors que ce n’est pas le cas. Il a ainsi créé plusieurs catégories de personnes assistées sociales, entraînant de nombreux préjugés à leur égard. Une bonne partie de la société pense que les personnes à l’aide sociale vivent à leur crochet et sont gras durs, en vivant aux crochets de l’État. Mais, la réalité est toute autre. Ce sont les multinationales et les personnes à haut revenu qui vivent à nos crochets avec les largesses des gouvernements. Personne ne choisit l’aide sociale, personne ne choisit la pauvreté. Quant aux travailleuses et travailleurs au salaire minimum à 14,25 $ de l’heure (mai 2022), est-il normal qu’elles soient obligées de fréquenter les banque alimentaires pour se nourrir ?

 

Les indicateurs de la pauvreté

Trois indicateurs de la pauvreté existent : le seuil de pauvreté, la mesure du faible revenu (50 % de la médiane du revenu après impôt rajusté du ménage) et le mesure du panier de consommation. Mais, nous qui la vivons la constatons tous les jours : dans notre assiette vide, dans l’obligation de choisir entre acheter un médicament à la pharmacie ou payer un compte, dans la nécessité de marcher au lieu de prendre le bus, etc. C’est une question de survie au quotidien! L’OPDS a toujours considéré le seuil de faible revenu (SFR) avant impôt comme seuil de pauvreté jusqu’à l’arrivée d’une proposition de l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) sur la mesure du revenu viable après impôt.

 

Le seuil de faible revenu

Un ménage est considéré à faible revenu s’il consacre 20 % de plus de son revenu que la moyenne des ménages pour la nourriture, les vêtements et le logement selon Statistique Canada, avant et après impôt. Pour l’OPDS, ce ménage n’aurait aucun impôt à payer ce qui a justifié notre choix d’avant impôt. En 2021 ce seuil avant impôt était de 27 514 $. Mais Statistique Canada ne reconnait pas cette mesure comme un seuil de pauvreté.

 

La mesure du panier de consommation

Le gouvernement du Canada et du Québec utilisent la mesure du panier de consommation (MPC) qui couvre, ce qu’ils appellent, les besoins de base : le logement, la nourriture, les vêtements, le transport et d’autres éléments de première nécessité. Cette mesure est considérée comme  le seuil de pauvreté depuis 2019. Le gouvernement fédéral l’a revisé en 2020 pour augmenter le coût des dépenses mais Québec n’en n’a pas tenu compte.

« Rappelons que le Plan d’action gouvernemental pour l’inclusion et la participation sociale 2017-2023 comporte des cibles d’amélioration du revenu pour les personnes assistées sociales. Le gouvernement s’y engage à assurer, au 1er jan-vier 2021, un revenu disponible équivalant à 55,1 % de la MPC aux personnes à l’Aide sociale, à 77,6 % de la MPC aux personnes à la Solidarité sociale et à 90,1 % de la MPC aux personnes à la Solidarité sociale de longue durée » Le Collectif pour un Québec sans pauvreté trouve insuffisant la couverture des besoins de la MPC. Il mène une campagne pour que les besoins soient au moins couverts sur la base de la MPC revisée par le gouvernement fédéral. Mais Québec refuse. Et, les personnes assistées sociales sont de plus en plus pauvres peu importe leur catégorie. D’ailleurs, le Collectif revendique l’abolition des catégories à l’aide sociale

L’OPDS revendique l’abolition des catégories et un revenu décent pour toutes et tous pour nous permettre de sortir de la pauvreté, d’avoir la capacité de faire des choix et d’être libres !

 

L’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS)

En avril 2018, Philippe Hurteau de l’IRIS a produit une note économique, Le revenu viable : indicateur de sortie de pauvreté. Dans cette note, il mentionne qu’aucune mesure de la pauvreté ne permet de sortir de la pauvreté. Mais, la MPC est la mesure retenue qui permettrait en la complétant d’établir un revenu viable. Ce revenu est mis à jour annuellement. En 2020, il était de 27 948 $ après impôt. Ce revenu est calculé par l’IRIS depuis 2015.

« La mise en place d’un indicateur comme le revenu viable est, en ce sens, l’occasion de penser de manière lucide à une réelle lutte contre la pauvreté, mais aussi aux normes minimales du travail. Cela implique une réflexion sérieuse sur l’existence de travailleurs pauvres dans une société développée comme le Québec. Nous avons vu que l’usage des seuils de pauvreté existants pose problème. D’une part, la MPC semble utilisée comme seuil de sortie de la pauvreté, alors qu’il s’agit strictement de la couverture des besoins de base, […]. Le revenu viable est donc un indicateur qui permet de compléter la MPC, dans la mesure où les deux sont calculés à partir de différents paniers de dépenses minimales, mais en cherchant à atteindre des buts différents (couverture des besoins ou de sortie de pauvreté). […]. » IRIS, Note socioéconomique, p. 10

Ce revenu est mis à jour annuellement. À Montréal, en 2021, pour une personne seule, il est de 28 783 $ après impôt et il suppose un salaire horaire de 18 $/h.

 

La vie à l’aide sociale

En décembre 2021, il y avait 227 490 ménages à l’aide sociale, tous barèmes confondus, dont 85 % de personnes seules. Les ménages sont répartis comme suit selon leur programme :

– 113 466 ménages appartiennent au programme d’Aide sociale, avec des contraintes temporaires ou « considérés » sans contraintes ; ils ont une prestation moyenne de 769,44 $ par mois.

– 114 024 ménages appartiennent au programme de Solidarité sociale ; ils ont une prestation moyenne de

1 150,89 $ par mois.

Les personnes au programme d’Aide sociale avec contraintes temporaires ou « considérées » sans contraintes reçoivent en moyenne 769,44 $ par mois. Ce qui leur fait un revenu annuel d’aide sociale de 9 233,28 $.

Si on rajoute les miettes de la TPS (299 $ par année) et du crédit d’impôt pour solidarité (1 028 $ par année), elles ont un revenu total annuel de 10 560,28 $.

 – Le seuil de faible revenu (seuil de pauvreté pour l’OPDS), avant impôt, en 2021 (Statistique Canada) était de 26 620 $ par année. Le revenu viable, après impôt, était de 28 783 $. Nous sommes à peine à 38 % de ce revenu.

 

Logement

Selon le FRAPRU, en octobre 2021, le coût moyen du loyer sur l’Île de  Montréal (3½ pièces) était de 823 $ par mois ; ce qui fait un loyer annuel de 9 876 $.

Si on prend pour les personnes appartenant au programme d’Aide sociale, leur revenu total moyen annuel

10 560,28 $ moins leur coût moyen annuel de loyer 9 876 $, il leur reste, en moyenne, 684,28 $ par année ou ,87 $ par jour.

1,87 $ par jour pour l’alimentation, le chauffage et/ou l’électricité, l’entretien ménager, les soins de santé et personnels, les communications, l’habillement, l’ameublement, le transport, les loisirs, etc.

 

Alimentation

Le Dispensaire diététique de Montréal (DDM) propose un panier à provisions nutritif à faible coût depuis 1950. Le coût de ce panier à Montréal, pour une personne, en janvier 2021, était de 11,21 $ par jour. Ce panier est un minimum ; il suppose qu’on mange seulement ce qu’ils nous disent de manger, qu’on mange tous nos repas à la maison, qu’on cuisine avec austérité, qu’on ne fait pas d’excès et qu’on ne se paye aucune douceur! Dans les faits, nous payons notre loyer, nous mangeons pour 1,87 $ par jour et nous ne payons rien d’autre.

 

Non seulement nos besoins de base ne sont pas reconnus mais tous nos besoins sont niés. Nous avons droit de cité parce que nous sommes des citoyennes et des citoyens de cette société sur la terre où nous vivons et que nous avons le droit de couvrir l’ensemble de  besoins. Nous revendiquons un Revenu de citoyenneté qui nous amène à une réelle sortie de la pauvreté !